Comprendre l’alopécie androgénétique, la « calvitie » héréditaire

L’alopécie androgénétique est la forme la plus fréquente de perte de cheveux progressive, touchant hommes et femmes, mais avec des manifestations distinctes selon le sexe. Elle est le résultat de l’interaction entre la génétique, les hormones (en particulier les androgènes) et des facteurs locaux au niveau du follicule pileux.

Mécanisme principal : le rôle des hormones et de la sensibilité folliculaire

Le cœur du processus est l’action de la dihydrotestostérone (DHT), une hormone issue de la conversion de la testostérone par l’enzyme 5α-réductase. La DHT agit sur les récepteurs androgéniques situés dans les follicules pileux, surtout chez ceux qui sont génétiquement sensibles.

Avec le temps, sous l’effet de ce stress hormonal, plusieurs phénomènes se produisent :

  • Le cycle de croissance du cheveu (cycle pilaire : anagène → catagène → télogène) est raccourci, la phase anagène devient plus courte.
  • Les follicules deviennent progressivement plus petits : ce qu’on appelle la miniaturisation folliculaire. Cela conduit à des cheveux plus fins, moins pigmentés, et à terme, à la disparition possible du follicule actif dans les cas sévères.
  • Une inflammation légère, un stress oxydatif et une microcirculation moins efficace peuvent localement aggraver le processus.

La sensibilité d’un follicule donné à la DHT dépend de variations génétiques : certains porteurs auront des récepteurs androgéniques plus exprimés, ou des cofacteurs qui amplifient la réponse à la DHT.

Pourquoi les femmes ne présentent pas la “calvitie masculine” ?

L’un des paradoxes que beaucoup se posent : si l’alopécie androgénétique touche aussi les femmes, pourquoi elles ne “calvitient” pas comme les hommes ?

Voici les facteurs qui contribuent à cette différence :

  • Taux d’androgènes globalement plus faibles : les femmes produisent moins de testostérone, et donc, moins de DHT en circulation.
  • Distribution hormonale différente : la répartition des androgènes, l’activité de la 5α-réductase, et d’autres hormones (œstrogènes, hormones thyroïdiennes) modulent l’impact de la DHT.
  • Sensibilité folliculaire moindre sur certaines zones : les follicules du sommet du cuir chevelu chez la femme sont souvent moins sensibles, ou bien l’impact est plus diffus.
  • Génétique et gènes spécifiques : il existe des gènes qui modifient la sensibilité aux androgènes, et ceux-ci peuvent varier selon le sexe. Le fait que les femmes héritent aussi de gènes portés sur le chromosome X joue un rôle dans la variance de la réponse androgénique.
  • Manifestation diffuse plutôt que localisée : chez les femmes, l’amincissement capillaire est généralement plus diffus, centré sur le sommet du crâne, sans recul très prononcé de la ligne frontale.

En pratique, cela signifie que la calvitie masculine — avec des zones chauves bien définies, un recul frontal notable — est rarement le modèle chez les femmes. Le modèle féminin est souvent celui d’un éclaircissement général, d’une raie centrale qui “s’élargit”.

Les signes, l’âge d’apparition et la stabilisation de la calvitie

Quand commence la perte et comment elle progresse ?

Chez les hommes, les premiers signes d’alopécie peuvent apparaître dès la vingtaine : un recul discret de la ligne frontale, un amincissement à la tempe, une réduction de densité au sommet. Avec les années, cela évolue selon l’échelle de Norwood (stades I à VII).

Chez les femmes, les signes peuvent émerger à tout âge, mais sont plus fréquents en péri-ménopause ou après (les variations hormonales y contribuent). Le début est souvent très progressif, on remarque une diminution de densité, une raie plus large, parfois une plus grande visibilité du cuir chevelu au sommet.

À quel âge la perte se “stabilise” ?

Un sujet fréquemment posé est de savoir à quel âge la calvitie atteint une forme de stabilité. D’après les sources, la perte de cheveux liée à l’alopécie androgénétique tend à ralentir, voire à se stabiliser, entre 30 et 45 ans pour de nombreux individus. Cependant, cette “stabilisation” est relative et dépend fortement du patrimoine génétique, du niveau d’androgènes, de l’exposition aux facteurs aggravants, et du stade atteint

Cela ne veut pas dire que la chute cesse totalement : elle peut continuer lentement, ou être modulée par des facteurs internes ou externes (stress, carences, hormonothérapie, etc.). Mais cette période est souvent celle où les changements sont moins radicaux, ce qui permet de planifier des interventions (par exemple, greffes) sur des zones “stables”.

Autres causes de chute de cheveux : différencier les phénomènes

Avant de conclure qu’on est face à une alopécie androgénétique, il est important de distinguer d’autres formes de perte de cheveux :

  • Effluvium télogène (chute saisonnière ou stressée) : c’est une chute diffuse, transitoire, souvent en réponse à un “choc” (changement hormonal, carence, stress aigu). Elle dure typiquement 4 à 6 semaines puis s’arrête.
  • Chute chronique non androgénétique : parfois liée à une inflammation, une dermatose, une carence nutritionnelle, ou un problème endocrinien.
  • Alopecia areata, alopécie cicatricielle, etc. : ces formes ont des aspects cliniques particuliers (zones nettes, perte irréversible dans certains cas) et nécessitent un diagnostic spécialisé.
  • Facteurs aggravants : déficits en fer, carences vitaminiques, déséquilibres hormonaux (thyroïde, androgènes), coiffures traumatiques, stress, tabagisme, etc.

L’identification précise du type de chute est cruciale, car elle oriente les traitements possibles et leur efficacité.

Pourquoi une personne donnée perd ses cheveux plus ou moins tôt ou intensément ?

Voici quelques variables qui expliquent la variabilité entre individus :

  • Patrimoine génétique : certains héritent de récepteurs androgéniques particulièrement sensibles, ou de gènes régulateurs qui “modulent” la réponse hormonale au follicule.
  • Charge hormonale : un excès d’androgènes, ou une conversion locale accrue de testostérone en DHT, aggrave le processus.
  • État local du cuir chevelu : inflammation chronique, microcirculation insuffisante, stress oxydatif local, facteurs environnementaux défavorables.
  • Âge et “usure cellulaire” : plus on avance en âge, plus les mécanismes de réparation et de renouvellement folliculaire sont moins efficaces.
  • Facteurs externes ou modifiables : alimentation, sommeil, stress, tabac, soins capillaires agressifs, état de santé global (maladies, carences).
  • Seuil de “réserve folliculaire” : la densité initiale de follicules donne une “marge de sécurité” avant que les effets de la miniaturisation ne deviennent visibles.

En bref

  • L’alopécie androgénétique est un phénomène multifactoriel, où les hormones (notamment la DHT) et la sensibilité génétique des follicules jouent un rôle central.
  • Les femmes ne “calvitient” pas de la même façon que les hommes : leur perte est souvent plus diffuse, moins localisée, en raison de taux hormonaux plus faibles et d’une sensibilité folliculaire différente.
  • La perte de cheveux commence souvent dans la vingtaine ou la trentaine, mais la pente la plus marquée d’amincissement tend à ralentir entre 30 et 45 ans, avec une forme de “stabilisation” relative.
  • Il est essentiel de distinguer l’alopécie androgénétique des autres formes de chute (effluvium, dermatose, carences) pour choisir une approche adaptée.
  • Enfin, la variabilité individuelle est grande : deux personnes génétiquement prédisposées peuvent vivre des trajectoires très différentes selon les modulateurs externes et internes.